121. Pour démontrer l’existence d’une position dominante collective, il faut établir que les
entreprises « ont, ensemble, notamment en raison des facteurs de corrélation existant entre
elles, le pouvoir d'adopter une même ligne d'action sur le marché et d'agir dans une
mesure appréciable indépendamment des autres concurrents, de leur clientèle et,
finalement, des consommateurs » (CJCE, 31 mars 1998, aff. jointes C-68/94 et C-30/95,
Kali & Saltz, pt. 221; TPICE, 25 mars 1999, aff. T-102/96, Gencor, pt. 163).
122. La Cour de justice des Communautés européennes a confirmé l’analyse suivie par le TPI
dans l’arrêt Airtours du 6 juin 2002, dans son arrêt du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony
Corporation of America/Impala (C-413/06 P, Rec. p. I-4951), tout en invitant à une
approche, non pas mécanique mais coordonnée, des trois critères qu’elle a fait siens.
123. La démonstration d’une position dominante collective suppose que soit mise en évidence
l’adoption effective d’une ligne d’action commune sur le marché. Plusieurs entreprises
présentes simultanément sur un même marché peuvent être considérées comme détenant
conjointement une position dominante s'il existe entre elles une interdépendance qui les
conduit à adopter une stratégie explicitement ou implicitement coordonnée. En l'absence de
liens structurels, la seule structure du marché peut permettre de mettre en évidence une
position dominante collective, dès lors que les trois critères cumulatifs dégagés par le
Tribunal de première instance des communautés européennes dans l'arrêt Airtours précité
sont réunis, à savoir la transparence du marché concerné, la possibilité qu’il existe une
coordination tacite et durable (supposant l’exercice éventuel de représailles sur les
entreprises déviant de la ligne d'action commune), et enfin la non-contestabilité du marché.
Sur la transparence du marché
124. La jurisprudence Airtours précise, pour caractériser une dominance collective, que
« chaque membre de l'oligopole dominant doit pouvoir connaître le comportement des
autres membres, afin de vérifier s'ils adoptent ou non la même ligne d'action. (…) Il ne
suffit pas que chaque membre de l'oligopole dominant soit conscient que tous peuvent tirer
profit d'un comportement interdépendant sur le marché, mais il doit aussi disposer d'un
moyen de savoir si les autres opérateurs adoptent la même stratégie et s'ils la
maintiennent. La transparence sur le marché devrait, dès lors, être suffisante pour
permettre à chaque membre de l'oligopole dominant de connaître, de manière
suffisamment précise et immédiate, l'évolution du comportement sur le marché de chacun
des autres membres ».
125. La condition relative au marché impose à l’Autorité de vérifier que les produits des
entreprises en cause sont suffisamment homogènes pour être aisément substituables et que
le marché est suffisamment transparent pour que les entreprises soient immédiatement
informées de la déviation de l’une d’entre elles de la règle tacite commune. À cette fin, le
Conseil a rappelé (décision n° 06-D-18) que le critère de transparence ne suppose pas une
connaissance parfaite de l’ensemble des agissements des concurrents, mais une
connaissance suffisante des données stratégiques de marché et la possibilité d’une
surveillance de la ligne d’action suivie par les concurrents.
126. Concernant le degré de substituabilité observé, le service proposé en matière de contrôle
technique est homogène, dès lors qu’il consiste dans la vérification de points prédéfinis par
la réglementation. La prestation est très standardisée. Les possibilités de différenciation
existent, mais restent limitées puisqu’elles concernent essentiellement les prix (prix du
contrôle ou remises pour les flottes) et la qualité de service (par exemple, sous la forme
d’une activité de conseil ou d’aide à la gestion de la flotte).